Newsletter 18 (Juin 2011)

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Dans cette Newsletter cd2-conseils, nous allons faire le point sur la tomographie volumique à faisceau conique (cone beam) dans les cabinets dentaires.

Le point sur la technique du Cone Beam

Image CBCT De plus en plus de confrères s’équipent de Cone Beam.
Il nous a paru intéressant de rassembler un certain nombre d’informations sur cette technique de tomographie volumique à faisceau conique, aussi appelée Cone Beam ou CBCT (Cone Beam Computerised Tomography).

Technique

Bien que le résultat soit le même, une reconstitution en 3D d’une partie de l’organisme, la technique du cone beam et celle du scanner ne sont absolument pas identiques. Il est important de bien choisir son vocabulaire lorsque les chirurgiens-dentistes parlent de leurs appareils et qu’ils bannissent l’utilisation du terme scanner. L’utilisation des scanners, cantonnés aux cliniques et aux hôpitaux, n’est possible que pour les médecins radiologues.

Les appareils CBCT se distinguent du scanner traditionnel qui effectue plusieurs coupes linéaires se superposant lors des multiples rotations du système.

Principe du scanner            Principe du CBCT

Le cone beam quant à lui, travaille non plus avec un faisceau RX mince, mais avec un faisceau ouvert conique (d’où son appellation de cone beam), ce qui lui permettra en une seule révolution de balayer l’ensemble du volume à radiographier.

Matériel

Une très grande variété de matériel a été proposée.
Les premiers appareils étaient très semblables dans leur design et leur mode d’utilisation (patient allongé) aux scanners. Cela a contribué à entretenir la confusion entre ces deux techniques pourtant très différentes.
Puis des appareils, encore très volumineux, sont apparus. Les patients sont en position assise lors de l’examen. Ces machines sont encore commercialisées, mais tendent à être remplacées par des systèmes en tout point comparables aux appareils panoramiques. Ce sont des appareils installés sur une colonne mobile et le patient se teint debout lors de l’examen.

Ancien CBCT CBCT actuel position assise CBCT couplé à une panoramique

Les puissances des générateurs diminuent aussi de génération en génération. Alors que les premiers CBCT comportaient des générateurs de plus de 100 kV, les appareils actuels utilisent des générateurs de panoramique. Il est même possible de faire installer une option 3D à certains appareils panoramiques sans avoir à modifier le générateur.

Installation, Déclaration & Contrôles

La nouvelle norme d’installation NF C 15-160 « Installations pour la production et l’utilisation de rayonnements X – Exigences de radioprotection » de mars 2011 s’applique à tous les appareils utilisés en cabinet dentaire. Les CBCT y sont désignés sous le terme d’appareils pour « Imagerie radiologique dentaire volumique ».
Toutes les exigences de cette nouvelle norme s’appliquent donc à ces appareils. Pour plus d’informations sur cette norme, vous pouvez consulter le Dossier du site qui y est consacré.

Comme nos autres générateurs, les CBCT doivent être déclarés à l’ASN avant leur première utilisation.
Les praticiens utilisant à des fins de diagnostic des appareils générateurs de rayonnements ionisants ne peuvent procéder à des examens que si les appareils ont préalablement fait l’objet de la déclaration mentionnée aux articles R.1333-22 et R.1333-24 du Code de la Santé Publique.

Il est aussi bon de rappeler que seuls peuvent être remboursés … les examens radiologiques exécutés au moyen d’appareils et d’installations déclarés (Art. R.162-53 du CSP).

Cette déclaration se fera à l’aide du Formulaire DEC/DX de l’ASN. Des informations sur le dossier qui doit accompagner la déclaration sont disponibles dans la Newsletter 2 (Février 2010).

Toutes les obligations de maintenance et de contrôles périodiques s’appliquent aux CBCT. Il est important de comprendre que les appareils permettant de réaliser des examens 2D (panoramiques) et 3D sont obligatoirement soumis aux contrôles de qualité. Ces contrôles sont réalisés, en mode examens 2D, selon les modalités destinées aux panoramiques sur ces appareils.
A l’inverse, il n’existe pas encore de protocole de contrôle de qualité adapté aux appareils ne réalisant que des reconstitutions volumiques. Mais un groupe de travail est en train de réfléchir à la création d’un protocole adapté.

Tomographie volumique à faisceau conique de la face – Rapport d’évaluation

Les parties qui suivent proviennent d’un rapport de la HAS intitulé « Tomographie volumique a faisceau conique de la face ». Dans la mesure où ce rapport influence de façon très importante les possibilités d’utilisation et de prise en charge des actes réalisés avec des CBCT, nous avons décidé d’en reprendre de larges passages. Nous vous invitons pour plus de précisions à consulter le rapport intégral sur le site de la HAS.

Performances techniques et dosimétriques

Bien que la qualité de l’image soit difficile à définir et quantifier et que son estimation reste subjective, le CBCT a une résolution spatiale et une fiabilité qui semblent comparables à celle du scanner pour explorer des structures minéralisées telles que l’os ou les dents et pour permettre d’identifier des fractures, kystes ou lésions osseuses, corps étrangers, à l’intérieur de son champ de vue. En revanche, il ne permet pas la mesure réelle des densités.
La variation des paramètres entraine des différences significatives dans la qualité de l’image. Il est donc important de pouvoir sélectionner différents paramètres sur un même appareil, aussi raisonnablement bas que possible, afin de minimiser la dose délivrée au patient tout en ayant une qualité d’image suffisante pour l’application sélectionnée.
La précision et la fiabilité des mesures linéaires obtenues avec le CBCT sont suffisantes pour recourir à son utilisation dans la sphère dento-maxillo-faciale.

La dose délivrée par les appareils CBCT est inférieure à celle du scanner mais demeure significativement plus élevée que celle de la radiographie dentaire conventionnelle, panoramique et intra-orale. Les doses peuvent considérablement varier de 1,5 à 12 par rapport au scanner et de 4 à 42 par rapport au panoramique selon les appareils utilisés, grand ou petit champ.

Tailles des champs des CBCT

Avec un même appareil, les doses peuvent aussi varier selon le volume exploré et les paramètres techniques retenus. Elles seront d’autant moins élevées que le champ exploré est réduit et les paramètres abaissés. De la même façon, certains appareils programmés sur mode ultra (haute résolution et champ maximal) procurent des doses proches des scanners optimisés.

Indications et champs d’application clinique du CBCT

Cariologie
La littérature ne permet pas de conclure sur l’apport clinique potentiel du CBCT dans le domaine de la cariologie et cette technique ne saurait se substituer, à ce jour, aux techniques radiographiques conventionnelles pour le dépistage des caries.

Endodontie et chirurgie endodontique
L’imagerie CBCT en endodontie peut présenter un intérêt dans certains cas bien sélectionnés, lorsque les informations fournies par la clinique et la radiologie conventionnelle ne sont pas suffisamment contributives au diagnostic et qu’une image tridimensionnelle est indispensable :
– bilan péri-apical pré-chirurgical particulièrement dans la région maxillaire postérieure ou dans la région du foramen mentonnier ;
– recherche et localisation d’un canal radiculaire supplémentaire ;
– bilan d’une pathologie radiculaire type fracture, résorption et/ou péri-apicale.
Le recours à l’imagerie CBCT ne saurait se justifier s’il n’améliore pas dans ces cas précis la prise en charge et le pronostic de la dent.
Le groupe de travail précise que l’examen, pour l’exploration endodontique, exige une précision et une définition nécessitant une forte résolution spatiale.

Parodontologie
L’imagerie CBCT en parodontologie peut présenter un intérêt dans un très petit nombre de cas sélectionnés, tels que le bilan pré-chirurgical pour le traitement de lésions de la furcation de molaires maxillaires, en apportant des informations non fournies par la clinique et la radiologie conventionnelle (informations anatomiques type fusion ou proximité radiculaire), informations qui amélioreraient dans ces cas précis la prise en charge et le pronostic de la dent.
Le groupe de travail estime que le CBCT pourrait se substituer à l’avenir à l’examen long cône pour le bilan parodontal et qu’il pourrait présenter un intérêt particulier pour le diagnostic différentiel des lésions endo-parodontales avec des signes cliniques et une symptomatologie mal définis.

Implantologie et chirurgie buccale
Les performances techniques de l’appareil CBCT en termes de précision et de fiabilité des mesures pré-implantaires sont comparables à celles du scanner.
Les études in vivo ont mis en évidence la qualité diagnostique satisfaisante du CBCT pour préciser la position d’éléments anatomiques, par exemple la topographie du canal mandibulaire avant la pose d’implants ou l’extraction chirurgicale de troisièmes molaires inférieures incluses.
Il pourrait donc se substituer au scanner pour l’analyse tomodensitométrique pré-implantaire ainsi que pour le bilan pré-chirurgical avant l’extraction de dents incluses, en complément d’un premier bilan radiographique insuffisamment contributif. Cette décision doit toutefois s’appuyer sur un principe de radioprotection en choisissant un appareil, une taille de champ et un paramétrage qui, pour une qualité d’image comparable et suffisante, induisent un niveau d’irradiation inférieur à celui d’un examen scanner réalisé selon des protocoles optimisés « low dose » ou d’un examen tomographique scanora (désormais de moins en moins utilisé).
Le groupe de travail rajoute pour indication la prise en charge des pathologies osseuses.

Orthodontie
Les mesures céphalométriques obtenues avec le CBCT sont comparables à celles obtenues avec la céphalométrie conventionnelle et sont pour la plupart suffisamment précises et reproductibles. Toutefois, à ce jour, des études supplémentaires sont nécessaires afin d’évaluer les bénéfices cliniques du CBCT pour l’analyse céphalométrique. Il est nécessaire de définir des nouveaux points de référence et de valider des protocoles d’analyse céphalométrique 3D.
Le CBCT ne saurait donc se substituer pour l’instant à la téléradiographie conventionnelle.
Il pourrait se substituer au scanner, au regard du principe de radioprotection et selon des règles d’optimisation, quand une analyse tridimensionnelle est indispensable, par exemple pour des cas de dysmorphoses maxillo-faciales majeures nécessitant une approche chirurgicale.

Chirurgie maxillo-faciale
Lorsqu’une imagerie sectionnelle est nécessaire en chirurgie orthognatique, en traumatologie, pour les pathologies osseuses, le CBCT pourrait se substituer au scanner dans des cas sélectionnés à la condition :
– qu’une exploration des tissus mous ne soit pas requise,
– que le niveau d’irradiation soit moindre que celui obtenu avec l’imagerie scanner, au regard du principe de radioprotection et selon des règles d’optimisation.
Des études cliniques préliminaires soulignent la faisabilité technique et les perspectives associées à la navigation chirurgicale avec imagerie per-opératoire CBCT.
Toutefois, des études complémentaires contrôlées sont nécessaires pour en évaluer les bénéfices potentiels.

ORL
Des études préliminaires soulignent la faisabilité technique de l’examen CBCT pour explorer les sinus, pour évaluer des pathologies et des implants au niveau de l’oreille moyenne ainsi que pour la navigation chirurgicale avec imagerie per-opératoire en chirurgie endoscopique du sinus.
Des études supplémentaires comparatives sont toutefois nécessaires pour confirmer ces premiers résultats et pour conclure sur les bénéfices potentiels du CBCT par rapport aux autres techniques d’imagerie.
Le groupe de travail précise que le CBCT pourrait se substituer au scanner pour le bilan des sinusites du fait de son intérêt dosimétrique.

ATM
Les études (in vitro) soulignent la faisabilité technique de l’examen CBCT pour l’étude des tissus osseux de l’ATM (par exemple mise en évidence ostéophytes et érosions). A ce jour, il est toutefois difficile de conclure sur l’apport diagnostique du CBCT par rapport aux autres techniques, tomographie et scanner et des études cliniques comparant ces techniques sont nécessaires.
Toutefois, quand le recours à l’imagerie sectionnelle est justifié pour orienter la prise en charge thérapeutique, le CBCT pourrait se substituer aux autres techniques uniquement si son intérêt dosimétrique est démontré.
Le groupe de travail précise que les indications restent limitées à la traumatologie et aux pathologies dégénératives. Les pathologies discales et ligamentaires sont quant à elles réservées à l’IRM.

Conditions de réalisation

Plusieurs principes fondamentaux en vue d’un examen CBCT doivent être respectés :

  • les principes de justification et d’optimisation, à savoir démontrer la réelle nécessité de l’examen avec des bénéfices l’emportant sur les risques, avec une dose d’exposition la plus faible possible,
  • le respect des règles de radioprotection, contrôle qualité etc..
  • la nécessité d’une formation initiale adéquate et d’une formation continue après qualification.

Des recommandations européennes ont apporté des précisions sur la qualification :
– Les dentistes responsables d’un équipement CBCT qui n’ont pas reçu préalablement de formation adéquate théorique et pratique doivent subir une période additionnelle de formation théorique et pratique validée par une institution académique (université ou équivalent). Quand une qualification nationale de spécialité en radiologie dento-maxillo-faciale existe, la conception et la délivrance de programmes de formation en CBCT doivent impliquer un radiologue spécialisé en radiologie dento-maxillo-faciale.
– Pour les images CBCT des dents, de leurs tissus de soutien, de la mandibule et du maxillaire jusqu’au plancher nasal (soit champs de vue 8×8 ou inférieurs), l’évaluation clinique («commentaire radiologique») doit être réalisé par un radiologue spécialisé en radiologie dento-maxillo-faciale ou si ce n’est pas possible, par un chirurgien dentiste correctement formé.
– Pour des petits champs de vue non dentaires (par exemple os temporal) et pour toute image CBCT craniofaciale (champs de vue s’étendant au-delà des dents, de leurs tissus de soutien, de la mandibule, incluant l’ATM, et du maxillaire jusqu’au plancher nasal), l’évaluation clinique (« commentaire radiologique ») doit être réalisée par un radiologue spécialisé en dento-maxillo-facial ou par un radiologue clinicien (radiologue médical).

Le groupe de travail précise quant à lui qu’il existe en Europe des spécialités en radiologie dento-maxillo-faciale, attestées par des diplômes, mais pas encore en France et qu’il est donc nécessaire d’introduire des formations validées.
A ce jour, les appareils grand champ doivent être réservés aux radiologues en attendant que des chirurgiens dentistes reçoivent une formation diplômante spécifiquement dédiée. L’accès au grand champ pourrait toutefois être possible, dès à présent, pour certaines équipes hospitalo-universitaires, dentaires ou orthodontiques, afin de poursuivre leurs travaux et recherches.
Les experts rappellent le code de la santé publique (article R1333-66) : « tout acte radiologique doit donner lieu à un compte-rendu qui, outre l’interprétation, reprend les éléments justifiant l’acte radiologique, les paramètres d’optimisation de l’exposition retenus et les informations utiles à l’estimation de la dose reçue par le patient. »

Conclusions du rapport d’évaluation

Les performances techniques et dosimétriques de l’examen CBCT peuvent permettre de le proposer dans certaines indications cliniques bien sélectionnées soit pour le diagnostic de pathologies et pour un bilan pré-opératoire, en endodontie, chirurgie buccale et implantaire voire parodontale quand l’étude des tissus mous n’est pas requise.
Dans tous ces cas, des principes fondamentaux de justification et d’optimisation doivent être respectés. Le CBCT ne peut se substituer aux autres examens d’imagerie s’il n’améliore pas la prise en charge des patients et si son intérêt dosimétrique n’est pas démontré.
A ce jour, des études supplémentaires sont encore nécessaires pour apprécier l’apport du CBCT dans certaines indications maxillo-faciales, en orthodontie et ORL.
Une formation est indispensable ce qui sous-entend en France la mise en place de formations spécifiquement dédiées.

Cotations des actes réalisés avec des CBCT

Le rapport d’évaluation met en évidence l’intérêt de la technique de tomographie volumique à faisceau conique dans certains cas bien précis. Il est alors tout naturel que les confrères utilisent ces appareils et souhaitent se faire honorer de leurs actes. Malheureusement, des informations prises auprès de la caisse de sécurité sociale du Nord ne laissent pas beaucoup d’espoir. Les actes réalisés en 3D avec la technique Cone Beam ne sont pas pris en charge par l’Assurance Maladie.

La position officielle de la CNAMTS est la suivante:

« La tomographie volumique à faisceau conique de la face (cone beam) a été évaluée par la HAS (rapport décembre 2009). L’amélioration du service attendu jugée mineure et l’absence de lieu de formation en France, ne permettent pas d’envisager dans l’immédiat, l’inscription de cet acte dans les Nomenclatures. Aucune assimilation CCAM (cf rapport HAS -juin 2009- YYYY308) ou NGAP n’est tolérée pour la facturation de cet acte. Les actes de radiographie conventionnelle effectués sur des appareils mixtes sont éligibles aux codes CCAM pour les médecins ou cotations NGAP pour les dentistes (essentiellement panoramique dentaire). »

Les radiographies panoramiques prises avec des CBCT qui peuvent aussi réaliser des radiographies conventionnelles 2D restent prises en charge avec les cotations existantes.

Sur le site ameli.fr, les mêmes conclusions sont énoncées (pas de prise en charge) bien que l’argumentation diffère légèrement.

La tomographie volumique à faisceau conique de la face est un acte dont le service médical rendu a été évalué par la Haute Autorité de Santé.

Dans son rapport de décembre 2009, l’HAS précise que « les dentistes responsables d’un équipement CBCT (Cone Beam Computerized Tomography) qui n’ont pas reçu préalablement de formation adéquate théorique et pratique doivent subir une période additionnelle de formation théorique et pratique validée par une institution académique (université ou équivalent) ».

La Haute Autorité de Santé ajoute que la réalisation de cet acte sur « appareil grand champ est réservée aux radiologues, en attendant que des chirurgiens-dentistes reçoivent une formation diplômante spécifiquement dédiée ».

L’imagerie CBCT n’est pas inscrite à la Classification Commune des Actes Médicaux, ni à la Nomenclature Générale des Actes Professionnels. Elle ne peut faire l’objet d’une cotation par assimilation. En conséquence, elle n’est, en aucun cas, remboursable par l’Assurance Maladie.

Il est parfaitement illogique qu’une technique permettant, dans des cas bien précis, d’obtenir un examen de qualité et apportant un bénéfice en terme de radioprotection ne puisse pas être prise en charge par la sécurité sociale.
Il semble néanmoins que des évolutions positives soient à attendre sur ce point.

Nous espérons que cette Newsletter cd2-conseils vous a plu et nous attendons vos remarques et suggestions pour l’améliorer.
Bien cordialement,
L’Equipe cd2-conseils